Un grand pas vers l’autonomie stratégique européenne

28 mars 2023

Août 2022, l’administration Biden adopte l’Inflation Reduction Act (IRA): un ensemble de mesures budgétaires pour promouvoir la décarbonation de l’industrie américaine. Si l’ambition climatique est inédite, elle suscite de fortes inquiétudes outre-Atlantique. Avec près de 400 milliards de dollars pour aider à l’achat de voitures électriques ou soutenir l’éolien, l’UE risquerait d’être distancée dans la course aux technologies vertes. Impossible de laisser faire sans rien dire.

Après avoir adopté une série de lois pour concrétiser son objectif de neutralité climatique à l’horizon 2050, comme la taxe carbone aux frontières, l’UE s’attaque désormais à booster l’écosystème européen des technologies vertes. A la suite de la résolution sur la réponse à l'IRA, portée par notre eurodéputée Valérie Hayer au Parlement européen lors de la plénière de février à Strasbourg, la Commission européenne a présenté le 16 mars son plan. Deux piliers ambitieux : le règlement pour une industrie zéro-émission et celui sur les matières premières critiques.

Promouvoir la production européenne de technologies vertes

L’objectif du règlement pour une industrie zéro-émission (Net Zéro Industry Act) est clair : produire 40% des besoins européens en technologies vertes d’ici à 2030 sur le sol européen. À cette fin, il propose d’accélérer l’octroi des permis pour les projets industriels verts. Parmi les technologies favorisées, sont notamment mis en avant le solaire, l’éolien, les batteries ou encore la géothermie. Par ailleurs, des projets considérés comme « stratégiques » – ceux qui contribueront à augmenter de manière significative les capacités de production européennes pour une de ces technologies – bénéficieront d’allègements supplémentaires : un octroi de permis prioritaire, une facilité de financement et une simplification du cadre légal.

Une ambition française pour plus d'autonomie stratégique

« Nous retrouvons dans ce texte beaucoup de choses que nous avons soutenues », souligne Laurence Boone, notre Secrétaire d’Etat chargée de l’Europe. En effet, ces mesures avaient été portées par la France dans son programme « Made in Europe ». Alors que les détracteurs criaient au protectionnisme et les plus frileux doutaient de son acceptation par les autres Etats membres, la France appelait déjà à fixer des objectifs de production pour les technologies vertes, telles que le solaire ou la géothermie. Plus encore, Paris souhaitait que ces objectifs s’étendent aux matières premières rares, nécessaires aux technologies vertes.

Garantir l’accès aux matières premières pour la transition écologique

C’est maintenant chose faite avec le règlement sur les matières premières critiques (Critical Raw Material Act) qui vise à augmenter les capacités de production européennes dans ces matières clefs pour la transition écologique. En effet, à quoi bon promouvoir ces technologies vertes si l’UE demeure dépendante des pays étrangers pour les concevoir ? À titre d’exemple, la Chine produit à elle seule 73% des batteries mondiales et contrôle 23 % de l’exploitation minière de lithium nécessaire à la fabrication de ces dernières.

Face à ce constat, la Commission européenne a sélectionné un certain nombre de matières premières stratégiques, comme le lithium ou le cobalt, pour lesquelles la construction de projets d’usines sur le sol européen sera grandement accélérée et les financements facilités. Les objectifs sont d’extraire 10 % des matières premières stratégiques utilisés par l’UE, d’en raffiner 40 % et d’en recycler 15 %, tout cela en respectant des critères environnementaux stricts.

Ces deux règlements (Net Zéro Industry Act et Critical Raw Material Act) vont maintenant être discutés au Parlement européen et au Conseil de l’UE. Une chose est sûre, c’est qu’avec ces deux textes, l’UE fait un (très) grand pas de plus vers son autonomie stratégique.