L’Italie face à la crise migratoire : quelle réponse de l’Europe ?

26 avr. 2023

Une nouvelle loi sur les sauvetages en mer, un état d'urgence migratoire, un décret visant l'un des statuts de protection spéciale des migrants… À la suite du naufrage ayant coûté la vie à 79 personnes au large des côtes italiennes au mois de mars, la première ministre italienne Giorgia Meloni multiplie les annonces en matière d'immigration.

L’association Renaissance Européenne Paris a d’ailleurs organisé vendredi dernier une conférence-débat sur le thème « Politique migratoire : le contentieux européen de l'Italie » en présence de notre eurodéputé Renew  Europe Sandro Gozi; et Corinne Balleix, enseignante à Sciences Po. Les échanges ont été riches et ont permis de faire le point sur les mesures prises par le gouvernement de Meloni et leur impact au niveau européen. En particulier, le 18 avril cette dernière a décrété l'état d'urgence migratoire, pour une durée de 6 mois. Cette annonce vise à pousser Bruxelles à prendre ses responsabilités, alors que l’Italie a enregistré cette année une augmentation de 300% des arrivées irrégulières par la mer. En effet, Rome réclame depuis des années une "part équitable" à l’échelle européenne. Et c’est précisément ce que vise le Pacte asile et migration, présenté en septembre 2020 par la Commission européenne : plus de solidarité entre les États membres de l'UE pour gérer les flux migratoires.

Lors de la plénière du 20 avril, le Parlement européen a adopté sa position sur trois points clés de la réforme : 

  • Les eurodéputés maintiennent le principe fondateur du règlement de Dublin, un ensemble de règles qualifiées de « préhistoriques » par le président italien Sergio Mattarella. Ce texte prévoit que toute demande d’asile doit être traitée dans le pays d’entrée de l’UE. Mais le Parlement envisage plus d'exceptions comme les liens familiaux ou éducatifs qu'un migrant pourrait avoir avec un Etat membre particulier.
  • De nouvelles dispositions permettraient de répartir les nouveaux arrivants dans l'UE. Cette solidarité pourrait s'exprimer par la relocalisation des migrants présents dans les pays membres en première ligne.
  • Enfin le projet de règlement gérant les « situations de crise », de loin le texte le plus discuté et le plus polémique, prévoit que les redéploiements deviendraient contraignants lorsqu'un État membre déclarerait une situation de crise. La Commission devra alors évaluer la demande d’urgence. Si elle est confirmée, il faudra alors fixer des quotas de répartition en fonction de la population et du PIB des partenaires européens.

C’est précisément cette relocalisation obligatoire que souhaitent les pays méditerranéens. Ce règlement gérant les « situations de crise » a été confirmé par 419 voix pour, dont celles du groupe Renew Europe, et 129 voix contre. Parmi ces derniers, figurent les eurodéputés français Les Républicains, alors même que leur groupe (PPE) a voté pour. Une hypocrisie de plus de la droite française qui rejette toute évolution vers davantage de solidarité européenne en matière d’immigration, et confirme leur rapprochement avec les élus du Rassemblement national (RN) qui ont évidemment voté contre. Pourtant, les élus italiens, eux, ont voté pour, notamment ceux de la Ligue du Nord et de Fratelli d’Italia, le parti d’extrême droite de Giorgia Meloni. 

Pour Fabienne Keller, notre eurodéputée Renew Europe, rapporteur du Parlement européen sur le règlement relatif aux procédures d'asile, « il s'agit d'un moment décisif pour mettre en place la réforme de la migration et de l'asile, en apportant des solutions durables à long terme qui peuvent résister à l'épreuve du temps »

Les négociations entre le Conseil et le Parlement pour trouver un texte commun s’annoncent difficiles, le risque étant que les Etats membres privilégient une approche sécuritaire au détriment des mécanismes de solidarité. Le chemin pour une politique européenne d’asile et d’immigration plus juste et équitable est encore long.