Devoir de vigilance : pour des multinationales plus responsables

1 juin 2023

Le 25 avril dernier, soit 10 ans et un jour après l’effondrement de l’usine textile du Rana Plaza qui a coûté la vie à plus de 1120 travailleurs bangladais, la commission des affaires juridiques du Parlement européen a adopté sa position sur la directive relative au devoir de vigilance des entreprises. Comme l’explique Pascal Canfin, notre eurodéputé Renew Europe spécialiste des questions environnementales, l’objectif de cette directive est clair. « Que ce soit des chaussures fabriquées par des enfants, des ouvriers travaillant dans des usines peu sûres, des produits contenant des substances mauvaises pour la santé, des denrées alimentaires dont la production entraîne la déforestation... Nous avons tous entendu parler de telles pratiques. Cette nouvelle loi européenne vise à y mettre fin. »

Rendre les multinationales plus responsables

Venant renforcer les mesures déjà prises par certains États membres, dont la loi française de 2017 sur le devoir de vigilance, cette directive obligera les grandes entreprises à mettre en œuvre des politiques ambitieuses pour assurer le respect des droits de l’Homme et de l’environnement tout au long de leur chaîne d’approvisionnement. Elle s’appliquera à toutes les multinationales qui font des affaires en Europe. Cela signifie que les grandes entreprises chinoises ou américaines opérant dans l’UE devront également faire preuve de vigilance, sous peine de se voir infliger de lourdes amendes ou de s’exposer à des demandes en réparation de la part des victimes. L’objectif de l’UE à travers ce texte est donc d’envergure. Il s’agit de rendre les multinationales plus responsables et de favoriser l’adoption de modèles d’affaires durables par les industriels du monde entier.

Intégrer la vigilance à tous les niveaux

Dans la pratique, cette directive exigera des grandes entreprises qu’elles prennent en compte le devoir de vigilance à tous les niveaux de leurs activités, en l’intégrant dans leurs principes d’organisation et stratégie de développement. Elles seront civilement responsables des violations qui découlent de leurs activités et devront tout faire pour les recenser, les prévenir et y mettre fin. Par exemple, les multinationales veilleront à ce que leurs employés – y compris leurs sous-traitants – aient accès à des conditions de travail sûres, telles que de la nourriture en quantité suffisante ou des équipements de protection. A défaut de quoi, elles devront prendre des mesures pour remédier à ces injustices. Cela en va de même dans le domaine de l’environnement, où les multinationales devront prendre des mesures concrètes pour lutter contre la pollution ou la perte de biodiversité.

Mieux protéger l’environnement

La position adoptée par la Commission des affaires juridiques du Parlement européen contient aussi une proposition décisive et défendue de longue date par le groupe Renew Europe pour mieux intégrer la protection de l’environnement dans la gouvernance quotidienne des grandes entreprises. Pascal Canfin se réjouit ainsi que « toutes les entreprises de plus de 1 000 salariés […] doivent obligatoirement mettre en place une politique interne pour qu’une partie significative des bonus de leurs dirigeants soient liés à l’atteinte d’objectifs climatiques. C’est un combat que je mène depuis deux ans car dans la gestion opérationnelle d'une grande entreprise, le fait d'intégrer le climat dans le calcul du bonus annuel est un levier de changement important et visible, même pour les dirigeants les moins convaincus par le sujet… ».

Renew Europe veut aller encore plus loin

Alors que les négociations entre le Parlement européen et le Conseil européen vont bientôt débuter pour parvenir à un accord final sur le devoir de vigilance, une chose est sûre, c’est que le groupe Renew Europe ne compte pas s’arrêter là pour améliorer les conditions de travail à travers le monde. Valérie Hayer, notre eurodéputée Renew Europe spécialiste des questions budgétaires, propose notamment de créer une « taxe équitable aux frontières ». Sur le modèle de la taxe carbone aux frontières qui vient d’être adoptée par l’UE, cette taxe équitable « imposerait à toute multinationale désirant vendre dans le marché européen des produits fabriqués par des travailleurs extrêmement pauvres de payer une charge à l'UE. Cette charge serait équivalente à la différence entre le seuil de pauvreté et le montant que ce travailleur a véritablement touché. »

Car si nous avons déjà infléchi les règles de la mondialisation pour le climat, nous pouvons aussi le faire pour les conditions de travail !